Parce que l’e-sport est encore très jeune et toujours en voix de professionnalisation. Il est très difficile d’estimer l’argent que génère une équipe professionnelle ou un grand événement. Contrats privés, secret, concurrence. Autant de facteurs qui rendent notre lecture très opaque. SmartCast lève le voile !
Il faut la jouer franc-jeu. Ce papier est basé sur des estimations, aucun contrat n’est passé entre nos doigts. Notre travail s’est basé sur des sources sérieuses comme esport-earnings. Nous nous sommes amusés avec des chiffres qui sont passés sous le regard avisé de plusieurs observateurs et joueurs chevronnés du milieu.
Pour réaliser ce dossier nous nous sommes intéressés à un cas : les EnvyUS. En plus particulier à leur squad Counter Strike. C’est une équipe composée de 5 joueurs français pouvant être considérée comme la deuxième meilleure équipe du monde. Nous avons scruté tous leurs résultats sur l’année 2015 soit près de 7 mois de compétition. Voici ce qu’il en ressort :
Une équipe combien ça coûte ?
Du 11 février au 20 septembre, les EnvyUS ont participé à 18 compétitions un peu partout en Europe. La plupart de ces compétitions se sont déroulées physiquement. Et la saison n’est pas terminée, il reste encore plusieurs tournois à disputer pour les français. Ils se déplaceront prochainement à Cluj ou à Stockholm. On estime ces frais de déplacement pour l’encadrement de 6 personnes (5 joueurs + 1 coach) à $70 000 dollars dans l’année.
Les joueurs et leur manager perçoivent un salaire mensuel. Leur employeur, EnvyUs est régit par la société Envy Gaming LLC située aux USA. Difficile de connaitre les détails contractuels qui lient les deux parties. De ce fait la forme du contrat. La seule chose que l’on peut savoir c’est que 3 des joueurs : Nathan « NBK » Schmit, Fabien « Kioshima » Fiey & Vincent « Happy » Cervoni possèdent chacun une société sous forme de SA par action simplifiée. Basés à Nice, le lieu de la futur Gaming House du club, on peut en déduire que les joueurs cotisent et paient des impôts sur le sol français. La tâche se complique lorsque l’on sait que NBK vit en Autriche.
Pour parler du montant d’un salaire, il faudra partir d’une hypothèse. Nous partirons du principe que chaque joueur touche un salaire de base de $3000 dollars par mois. Le coach qui gère les affaires quotidiennes de l’équipe, et encadre l’équipe pour ses déplacements, touchera lui un salaire de $2000 dollars par mois. En considérant quelques frais d’équipements, d’accessoires à l’arrivée de l’équipe, sans oublier l’ajout des charges salariales. On peut arriver à un budget annuel avoisinant les $380 000 dollars rien que pour le squad Counter Strike.
Une équipe combien ça rapporte ?
Vient maintenant cette fameuse question. Combien rapporte l’équipe Counter Strike ? L’argent des cash prizes est la première source de revenu à laquelle on pense. Sur 18 compétitions, les frenchies ont remporté la somme de $306 000 dollars. Il reste encore 5 à 6 tournois à disputer pour les « boys in blues » dont un major à Cluj. Dans certains pays les gains remportés en tournois sont soumis à des taxes. On peut considérer que cela correspond à 10% de la somme.
La structure prend également un pourcentage du montant de ses gains. La moyenne se situe entre les 10 & 15%. Ce qui représenterait à l’instant la somme de $36 000 dollars.
Counter Strike possède une économie bien particulière. A chaque compétition majeure se met en place la vente de skins qui permettent aux joueurs et aux fans de customiser leurs armes. Si cet énorme succès rapporte beaucoup d’argent à Valve l’éditeur, il permet aux équipes les plus populaires d’augmenter sa trésorerie. Le marché des skins connait une croissance vertigineuse. Les équipes participantes aux ESL One de Cologne, ont perçu la somme de $4.2 millions de dollars. Rien que ça ! Quelle est la part du gâteau pour chaque équipe ? En croisant plusieurs sondages de popularités des équipes ainsi que le nombre d’abonnés des joueurs sur les réseaux sociaux, nous avons réussi à faire une estimation. EnvyUS aurait récolté la somme de $550 000 dollars en skins depuis le début de l’année.
Historiquement, le gros des revenus pour une structure reste la partie sponsoring. EnvyUS possède 5 sponsors de choix : Monster, Gaems, Astro, Scuf Gaming, DXRacer. Comment ces partenariats ont-ils été négociés ? Monster est une marque assez généreuse et le principal sponsor d’EnvyUS. Pour comparaison, Monster investit à hauteur de $4 millions de dollars pour son écurie américaine de moto GP. Selon nos estimations, le montant du deal entre les deux parties pourrait s’approcher des $250 000 dollars. L’exploitation de l’image de ses deux équipes, CS : GO & COD, permettrait à Envy de récolter la somme de $500 000 dollars auprès de ses sponsors.
A vos calculettes
En additionnant ces différentes sources de revenus, la structure arriverait à générer la somme de près de $1.3 millions de dollars. Pour son activité sur Counter Strike, EnvyUS serait bénéficiaire à hauteur de $225 000 dollars pour 8 mois d’activité. Le reste allant directement dans la poche des joueurs. Attention ce n’est pas du bénéfice net ! Une partie de cet argent doit surement permettre à la machine EnvyUS / Envy Gaming LLC de pérenniser ses activités dans la compétition électronique et dans la vente d’accessoires gaming.
Pour les joueurs si on cumule le salaire, les cash prizes et la vente des skins ont atteint donc un salaire mensuel qui tourne autour des $15 000 dollars. Quid du streaming, du coaching ? Avec leur planning de compétitions et d’entrainements, les cinq joueurs français n’ont pas énormément de temps pour se consacrer à ces activités. Ce n’est donc pas comptabilisé ici.
En bref, si ces résultats peuvent sensiblement changer de nos estimations, il apparait une dynamique indéniable. Le sport électronique – Counter Strike – est aujourd’hui un business qui rapporte de l’argent aux structures. Peut-être pas pour l’ensemble de ses acteurs, mais bien pour les équipes hyper-compétitives. Si sponsoriser les grands talents du gaming peut s’avérer bénéfique, cela représente toujours une lourde charge au départ. Une structure qui souhaiterait se lancer doit avoir les reins solides pour encaisser les premières dépenses.
En posant le baromètre sur cette sphère en pleine effervescence, il est limpide que le sport électronique devient de plus en plus profitable pour ses acteurs et possède encore de beaux jours devant lui.