Seconde conférence du DOJO Esport, animée par Jonas Ferry, responsable marketing chez Scuf Gaming, “Nous avons trouvé le R.O.I.” portait sur le nerf de la guerre : Le retour sur investissement. Pour en parler, Jonas était entouré de Sophia Metz, cofondatrice et présidente de la franchise Meltdown Esports Bar, ainsi que d’Andrey Cherednychenko et Benoît Pagotto, respectivement responsables marketing chez Natus Vincere et Fnatic, deux des plus grands clubs esports au monde.
Se diversifier
La question qui se cache derrière cette conférence est donc “est ce que l’esport est rentable ?” Andrey évoque le fait que Na’Vi n’a fait des bénéfices qu’une seule année (“2015 ou 2016”) à hauteur de 50.000$. “L’esport est un secteur grandissant qui rapporte de l’argent, souligne-t-il. Mais d’un autre côté, les dépenses grandissent plus vite”.
Benoît Pagotto de Fnatic le rejoint sur ce point : “Nous agissons comme une start-up : l’argent que nous gagnons, nous le réinvestissons immédiatement. Dès que nous gagnons un dollar, nous en dépensons deux”.
Fnatic possède à l’heure actuelle neuf équipes sur huit jeux, tandis que Na’Vi est à quatre équipes sur quatre jeux. Toutes deux sont engagées sur CS:GO, sans doute l’un des jeux qui coûte le plus cher aux clubs, mais qui en rapporte également le plus.
Mais dans l’esport, les équipes ne sont pas les seuls acteurs. Agences, joueurs, ligues, barcrafts… Sophia Metz contrebalance : “C’est plus facile de faire des profits parce que nous vendons de la bière, plaisante-t-elle, et donc quand nous gagnons 2€ nous en réinvestissons 1.”
Aujourd’hui, la franchise Meltdown, c’est 31 bars en Europe et au Canada qui organisent de nombreux événements jeux vidéo. La marque est représentée par plusieurs joueurs, comme Stephano, la légende de Starcraft 2 .
“Le Meltdown se concentre sur deux choses, ajoute Sophia : proposer des services aux fans, qui sont les fondements de l’esport, et leur amener la pratique dans le monde réel, avec des lieux pour qu’ils se rencontrent.”
Où trouver le R.O.I. ?
Mais alors où se trouve le meilleur R.O.I. ? Du côté des équipes et des joueurs pros, ou bien du côté des services aux fans ? Pour Benoît Pagotto, “il est important de se diversifier”. Actuellement, le sponsoring reste la première source de revenus pour beaucoup d’équipes. Fnatic est aujourd’hui l’une des plus connues car en plus de ses équipes, elle possède sa propre gamme de matériel et se décline aussi comme une marque “lifestyle”.
Du côté de Na’Vi, c’est par le biais de la holding ESForce, propriétaire du club, que la structure tente de se diversifier. L’entreprise, qui a aussi des parts dans SK Gaming et Virtus.pro, a créé la Yota Arena, une salle dédiée aux compétitions.
Mesurer et cibler le R.O.I.
Quelque soit le retour sur investissement, il faut avant tout être capable de le mesurer. Andrey évoque alors “l’Average Revenue Per User”, ou “ARPU”. Cette donnée désigne le chiffre d’affaires moyen réalisé par une entreprise avec un seul client. “L’ARPU de l’esport était autour de 2$ il y a quelques années. Aujourd’hui il est à 3$, et il sera bientôt de 5$. Par comparaison, l’ARPU du football est autour des 9$.”
Mais pour des mesures plus précises voire au cas par cas pour les marques, il reste encore à faire, bien que des agences venues du marketing et du sport soient déjà présentes sur le secteur. Par exemple, Na’Vi travaille avec Blinkfire Analytics, tandis que Fnatic s’est tournée vers plusieurs agences comme NewZoo, Sidekick ou Nielsen.
Estimer la portée de sa marque doit toujours se faire par rapport à une cible. Et là, c’est bien évidemment les Millenials qui sont visés, c’est à dire les personnes nées entre 1980 et 2000. Il s’agit surtout d’atteindre ceux qui aujourd’hui ne sont plus touchés par la TV, mais par internet, YouTube et le streaming, une caractéristique partagée par la plupart des fans d’esport.
C’est cette cible qui attire les marques non-endémiques. “Lorsqu’elles viennent à nous, il faut une à deux années pour les éduquer au milieu de l’esport, explique Andrey.” Il faut dire qu’un écosystème où les influenceurs manquent parfois de maturité peut réfréner l’enthousiasme des marques. “Nous devrions nous inspirer du sport pour mieux travailler avec les jeunes, conclut Andrey.”.
L’œil de Smartcast :
Tous les intervenants sont d’accord, la clef du R.O.I. positif est la diversification, mais surtout la patience. Si l’esport touche aujourd’hui une large cible, le coeur est encore jeune et n’a pas encore les moyens financiers de consommer. Benoît Pagotto conclu cette conférence sur ces mots : “Parier sur l’esport, c’est parier sur la jeunesse. Si vous voulez un retour sur investissement, croyez en elle.”